Fin de cavale

Que vous dit le 7 avril 1994? Le jour de votre naissance? Joyeux anniversaire. Le décès de votre grand-père? Yako. Le jour de votre mariage? Mazel Tov. Le jour de votre première cuite? Un verre ça va, trois verres, bonjour les dégâts.

Pour beaucoup, pour au moins douze millions de personnes, le 7 avril 1994 sonne le glas du génocide des Tutsi au Rwanda.

Ce génocide n’est pas apparu, comme par diaboliquement, il a été froidement calculé, étudié depuis plusieurs années. Il trouve son âme damnée dans l’opposition que se livraient Hutu power et Front patriotique rwandais. Durant cent jours, n’ayant rien à voir avec ceux du retour en métropole de l’empereur Napoléon en fuite de l’île d’Elbe, barrières, assassinats, massacres sont le lot dans tout le pays. Dans le même temps, évacuation de ressortissants étrangers, hésitation sur les mesures à prendre, réduction de la force MINUAR, palabres dans les instances internationales, laissent toute la place aux bains de sang, tueries et autres exterminations.

Le 17 juillet, après cent jours d’une boucherie sans nom, après l’exécution de 800.000 Tutsis et Hutus, après qu’un million de rwandais ait franchi, sans demander son reste, la frontière avec le Zaïre, le génocide prend fin, au moins dans les actes, mais pas dans les consciences.

Il flotte encore les ordres transmis par la radio des Milles collines. Radio qui n’a existé que du 8 juillet 1993 au 31 juillet 1994. Radio financée par Félicien Kabuga pour un budget, excusé du peu, de 3 millions de Francs Français. 3 millions qui représentaient quand même plus de 450 mille euros, soit plus de 600 mille de nos jours. Radio qui diffusait régulièrement la musique de Simon Bikindi; musique qui incitait à la haine des Tutsis.

Radio qui n’hésitait pas dans le choix de ses slogans, du style « Tuez tous les cafards ». Ce dernier se rapportant aux Tutsis, évidemment, mais aux Hutu modérés, également. Slogans délaissés pour des annonces, telles que « le 4 ou le 5, il va se passer un petit quelque chose,…, une petite chose est prévue. Cette petite chose va continuer les jours suivants…Hohoho! » Le génocide débute le 6!

Eh bien, Félicien Kabuga vient de se faire arrêter ce 16 mai 2020, à Asnières-sur-seine où il vivait sous une fausse identité. En cavale depuis 25 ans, comme les bourreaux nazis, il va finir devant un Tribunal qui ne tiendra pas compte de ses 85 ans, mais bel et bien, des victimes et de leurs survivants qui ont dû apprendre à faire avec.

Prenez bien soin de vous